Comment réduire l’empreinte carbone de votre site internet ?

éco conception numériquenumérique écoresponsablenumérique responsablesobriété numérique

Publié le 15 mars 2023

Développer un site internet écoconçu, c’est pas (si) sorcier ! Milena Gatelier, développeuse de sites internet écoconçus, démystifie pour nous le développement web responsable. On l’a interviewée pour qu’elle nous explique en quoi un site internet pollue. Mais aussi comment réduire son empreinte numérique ? Comment faire évoluer les pratiques de développement vers plus de durabilité ?

 

Plan de l’article :

Milena Gatelier : développeuse de sites web écoconçus

En quoi un site internet pollue ?

Comment réduire votre empreinte carbone numérique ?

Les mots de la fin : la démonstration par l’exemple !

Les ressources de Milena

 


Milena Gatelier : développeuse de sites web écoconçus

Pas évident de visualiser la pollution émise par un site internet, immatériel par nature !

L’idée en interviewant Milena, c’est de vous éclairer et de vous aider à comprendre comment ça se passe exactement derrière un site internet.

Et notamment, comprendre en quoi est-ce qu’un site web pollue.

Milena Gatelier dédiabolise le sujet et vous donne ses conseils pour limiter votre empreinte numérique.

Mais d’abord, quelques mots sur Milena :

  • Elle est créatrice de sites internet écoconçus.
  • Pourquoi a-t-elle choisi l’écoconception ? Pour les fortes valeurs héritées de l’univers dans lequel elle a grandi : à la campagne, proche de la nature, avec des parents engagés. D’où l’importance d’avoir une activité alignée sur ses valeurs.
  • Son objectif : limiter au maximum l’impact environnemental de ce qu’elle crée, aussi bien dans son activité professionnelle que sa vie personnelle.

 

Cet article a été rédigé sur la base de l’interview réalisée avec Milena dans le cadre de notre enquête sur le numérique écoresponsable.

 

En quoi un site internet pollue ?

Il faut déjà partir de la définition du site internet. Pour sortir de cette vision virtuelle et comprendre ce que ça implique concrètement.

Un site internet, c’est un ensemble de fichiers (des données) avec des textes, des images, des lignes de codes

Il est stocké sur un serveur. Donc un ordinateur allumé 24h/24 et 7j/7 dans un datacenter pour que le site soit toujours accessible.

Ce datacenter est alimenté en électricité : énergie nucléaire, charbon (très polluant), énergies renouvelables… selon le pays et le datacenter.

Il faut des ressources pour le construire :

  • Le datacenter : sable, fer, etc.
  • Les réseaux : câbles, poteaux électriques, …
  • Les appareils : métaux rares, plastique, etc.

 

Donc un impact social et environnemental très fort, bien plus réel qu’on ne le pense.

Vous allez aussi certainement abîmer les sols pour construire le bâtiment. De quoi impacter la biodiversité.

Côté interfaces des sites web : elles sont de plus en plus lourdes et complexes.

Cela veut dire :

  • plus gourmandes en énergie, donc elles émettent plus de CO2 (dépend aussi du type d’énergie utilisée).
  • plus exigeantes en termes de performance des appareils. Cela pose une problématique d’obsolescence programmée et nous pousse à renouveler nos appareils plus fréquemment.

 

Ensuite, quand on consulte un site, on envoie une requête sous forme d’électricité.

Pour afficher un site internet sur votre ordinateur, des informations sont envoyées au serveur, puis du serveur à notre appareil, en passant par les infrastructures réseau.

Plus le serveur est loin, plus cela demande de ressources.

Donc vous vous rendez compte qu’un site internet, même s’il est immatériel, est bien plus concret qu’il n’y paraît.

Et c’est tout cela qui contribue à l’empreinte environnementale du numérique.

 

Comment réduire votre empreinte carbone numérique ?

Côté conception et développement web

L’idée, c’est de diminuer l’impact à chaque étape de la création de votre site.

 

En amont de la création du site

Ça commence dès la rédaction du cahier des charges.

Il s’agit de penser à l’ensemble des étapes de la conception d’un site internet :

• Accessibilité,
• Fonctionnalités,
• Arborescence,
• Contenu,
• Design,
• Code,
• Fin de vie du site.

 

Pratiquer l’écoconception sociale

Souvent, quand on parle des problématiques écologiques, on les sépare des problématiques sociales. Mais les deux sont intimement liées.

 

L’écologie sera sociale ou ne sera pas.

 

– Milena Gatelier citant le rapport du GIEC

 

Rien n’est plus vrai.

Et pour le numérique, c’est pareil.

Voilà pourquoi il est essentiel de sensibiliser à l’écoconception et de la rendre accessible par tous les moyens possibles.

Et, en développement, c’est pareil.

Il faut faire attention à l’impact écologique, mais nous avons aussi une responsabilité quant à l’accessibilité et à l’inclusivité de nos créations.

Ce qui ne nous facilite pas la tâche, bien sûr.

Mais il faut faire attention :

  • aux contrastes,
  • à la lisibilité,
  • aux formats des médias,
  • à l’obsolescence programmée des logiciels,
  • aux zones moins couvertes par le réseaux,
  • etc.

C’est ça aussi l’écoconception.

Plus d’infos sur l’écoconception

On aborde toutes les problématiques de l’écoconception dans l’interview d’Aurélie Baton sur les bases de l’écoconception web.

 

Respecter les bonnes pratiques web

Il s’agit de déconstruire vos anciennes habitudes et respecter les bonnes pratiques du web.

Par exemple : minifier vos fichiers de code.

Côté langages de programmation et solutions techniques moins polluantes :

  • Privilégier le développement d’un site internet statique, sans base de données. Donc sans PHP ou MySQL. Ça veut dire avec considérablement moins de requêtes et donc plus léger.
  • Utiliser des langages de base :
    • Pour les sites internet esthétiques et minimalistes : HTML / CSS
    • Pour des applications et logiciels : C/C++, Rust, un langage de programmation réputé pour son côté éco-friendly, et plus sûr que les deux précédents. Le langage de programmation Go est aussi une bonne alternative

On peut faire plus de choses, mais on rentre dans le détail technique. Et ça va vraiment dépendre du projet et des besoins du client.

Plus d’inspiration

Vous pouvez faire un tour du côté des règles de qualité web de l’Opquast pour vous inspirer.

Ou écouter le 4ème épisode de notre série sur le numérique écoresponsable pour plus de bonnes pratiques.

 

Faire évoluer le développement

Pour Milena, c’est un aussi cheminement individuel pour mieux concevoir et faire évoluer le développement.

Il faut déconstruire, revenir à la base. Se demander comment sont faites les choses, quelles ressources utilisent-elles, pour mieux s’en imprégner et recréer son processus de manière plus vertueuse.

Mieux s’organiser, ce qui fait gagner du temps et permet d’être plus serein ou sereine dans le développement du projet.

 

Côté serveurs et hébergement

Mutualiser les serveurs : mettre plusieurs sites internet sur un serveur. Cela permet de réduire le nombre de serveurs nécessaires.

Favoriser un hébergement responsable.

Cela veut dire :

  • Alimenté en énergie renouvelable, et donc pas en ressources limitées,
  • Qui utilise un système de circulation d’air pour refroidir les serveurs (ou autre système moins polluant),
  • Un serveur local, proche de ses utilisateurs, pour limiter le chemin parcouru par les requêtes,
  • Faire attention au matériel utilisé (performant) et ce qu’il en fait en fin de vie. Par exemple, faire appel à une entreprise sérieuse de recyclage.

 

Un bon exemple d’hébergeur responsable, Infomaniak :

  • Il utilise de l’énergie renouvelable, pas de climatisation.
  • L’interface graphique est très intuitive, donc plus accessible.
  • Il a une réelle démarche RSE claire et transparente. Avec une certification, des actions de sensibilisation, notamment sur l’impact numérique avec une charte et des chiffres sur son impact, que l’entreprise assume. Et elle affiche un plan d’action pour réduire son empreinte.
  • Et si vous êtes proche de la Suisse, il est à proximité de votre entreprise et potentiellement de vos cibles. Donc vous restez local.

 

Votre site est obsolète et arrive en bout de course ? Pensez à libérer vos serveurs : résiliez votre contrat d’hébergement, supprimez votre site.

 

Chaque octet à un impact sur le monde réel.

 

– GreenIT.fr

 

Un site arrive en fin de vie lorsqu’il n’a plus lieu d’être : fin d’activité de votre entreprise,…

Pareil quand vous n’avez plus besoin d’une page.

Par exemple, vous pouvez supprimer la fiche d’un produit que vous ne vendez plus sur votre site e-commerce.

Chaque donnée enregistrée sur internet est stockée sur un serveur et donc pollue.

A chaque mail, formulaire envoyé, ce sont des informations envoyées et stockées quelque part.

D’où l’importance de les limiter au maximum.

 

Côté pratiques et usages numériques

Les équipements numériques :

  • Intégrer l’adage “le meilleur déchet, c’est celui que l’on ne produit pas”. Penser frugalité ! Faire plus avec moins,
  • Prendre grand soin de vos appareils numériques,
  • Les réparer s’ils sont cassés,
  • Acheter de manière responsable : marque durable et/ou de seconde main. On parle de l’usage des terminaux plus en détail dans le 3ème épisode de notre enquête sur le numérique écoresponsable,
  • Donner/revendre votre ancien appareil, s’il fonctionne encore,
  • Sinon, le recycler en dernier recours. Le recyclage nécessite d’utiliser pas mal de ressources. Et faites attention à qui vous le confiez pour le recycler. On aborde le sujet dans notre épisode sur le cadre légal autour du numérique écoresponsable.

 

Les mails :

  • Vider vos boîtes mails,
  • Faire le tri des newsletters : se désabonner de celles que vous ne lisez pas.
  • Éviter d’envoyer des mails à la terre entière si ce n’est pas utile.

 

Les logiciels :

  • Choisir des logiciels responsables, respectueux de la vie privée et de ses utilisateurs et utilisatrices. Notamment qui ne revendent pas leurs données. Donc pas Google !
  • Cherchez des alternatives aux outils que vous utilisez :
    • Pour une alternative cloud, vous avez Infomaniak, qui propose aussi d’autres fonctionnalités (mail, échange de mots de passe sécurisé, calendrier…)
    • Matomo (recommandé par la CNIL), comme alternative à Google Analytics
    • Framasoft : l’équivalent de Google Drive avec un temps de vie limité des fichiers, si on ne les utilise jamais.

 

Les conseils de Milena pour adopter des pratiques de développement web écoresponsable ?

Trouvez votre moteur pour passer au développement responsable

Il n’y a pas de recette miracle pour faciliter le changement. Il faut d’abord avoir envie de changer ses habitudes, souvent bien ancrées.

 

Pour moi, ce sont mes valeurs qui ont été moteur. Je ne pense pas qu’il y ait d’outils magiques.

 

– Milena Gatelier

 

Ce n’est jamais facile de changer ses habitudes, alors il faut trouver une bonne raison de le faire.

Pour enclencher un changement, il faut donc d’abord trouver son moteur :

  • nos valeurs,
  • l’avenir de la planète, de nos enfants,
  • le défi de l’innovation, se challenger,
  • se démarquer sur le marché,
  • suivre la tendance,
  • rester en phase avec la législation,…

 

Bref, il faut trouver ce qui nous anime vraiment, ce qui nous pousse à faire ce changement.

Pas de jugement : tous les moteurs sont respectables dans la mesure où ils améliorent notre impact général.

 

Déconstruire vos mauvaises habitudes de développement web

Ensuite, il s’agit de tout déconstruire.

Par exemple en écoconception, chercher à chaque instant du projet à diminuer son impact sur l’environnement par différentes actions.

Se demander proactivement d’où vient la pollution et comment agir dessus.

A ce moment, on est plus apte à innover. Plutôt que de se forcer et de le voir comme une contrainte.

La démarche devient à ce moment beaucoup plus naturelle : pas besoin de devenir expert ou experte en la matière pour commencer à agir, puisque ça coule de source.

En tout cas, c’est une démarche qui doit vraiment venir de soi.

Pour un web plus frugal : c’est agir dès maintenant !

Et puis ne comptez pas sur la technologie pour nous sauver. Le rapport du GIEC est formel : il faut faire preuve de frugalité.

Chacun et chacune doit prendre ses responsabilités.

Vous pouvez commencer par initier de nouveaux comportements, montrer l’exemple pour influencer et faire prendre de l’ampleur à ce mouvement.

Ça passe aussi par la déconstruction de vos limites.

Par exemple, n’attendez pas que le voisin ou la voisine le fasse pour vous y mettre. Ne vous enfermez pas dans vos habitudes et sortez de votre zone de confort.

Donc initiez le mouvement, suivez vos valeurs. Sinon on ne s’en sortira jamais.

Pourquoi peu de monde agit ?

Pour comprendre pourquoi on a tendance à ne pas agir, on vous recommande l’article le Bonpote sur les discours de l’inaction climat.

 

Les mots de la fin : la démonstration par l’exemple !

Le plus gros impact que vous puissiez avoir, et le plus intéressant, c’est de montrer l’exemple !

C’est ce qui marche le mieux pour sensibiliser.

Prouver que ça marche, que ça produit des choses positives de s’aligner avec ses valeurs, ça laisse place à l’imagination… et à l’action !

 

Les ressources de Milena

Dans la série interview…

Cette interview fait partie de notre enquête sur le numérique écoresponsable.

Nous avons aussi réalisé des interviews sur :

Bonne lecture !

A lire aussi

accessibilité numériquenumérique écoresponsableStratégie d'entreprise

Comment initier une démarche numérique responsable dans votre entreprise ?

croissance éthique

Comment allier éthique et croissance économique dans vos décisions stratégiques ?

communication responsable

Comment mettre en place une stratégie de communication responsable ?