Usages numériques et terminaux
Usages numériques et terminaux
Publié le 14 juin 2022
Après deux épisodes sur les enjeux et le cadre légal du numérique écoresponsable, place aux solutions ! Nos experts et expertes vous expliquent concrètement comment limiter votre empreinte carbone numérique. Aussi bien au niveau individuel que professionnel.
Dans cet épisode, on passe à l’action !
Nos expertes et nos experts vous livrent leurs conseils et leurs bonnes pratiques pour éclairer vos usages web et vos prochaines décisions d’achat.
Car en tant que consommateur ou consommatrice, vous avez le pouvoir. Le pouvoir de faire évoluer le numérique vers plus d’éthique.
On vous explique justement comment activer votre pouvoir. Vous allez voir, il y a de quoi faire !
Dans cet épisode, nous sommes accompagnées de :
- Tristan Nitot, animateur du podcast l’Octet Vert et entrepreneur
- Christophe Clouzeau, Expert green UX et éco-conception numérique chez Temesis
- Margo Chaillou, co-fondatrice et CEO de Improved Impact
- Ferréole Lespinasse, conseillère en sobriété éditoriale, refonte de site internet, rédaction et production de contenus
- Agnès Crepet, head of software longevity et IT pour Fairphone
- Anne Rabot, experte Green IT, directrice RSE et relation client de Resilio
L’article résumé est en cours de rédaction et sortira prochainement. Un peu de patience 😉
Bonne lecture ou bonne écoute !
Plan :
Retranscription épisode 3 : les usages numériques et terminaux
Retranscription épisode 3 : usages numériques écoresponsables
Introduction
Marine [00:00:20]
Tous les trois mois, on explore une nouvelle initiative éthique que l’on veut mettre en place dans l’agence. L’occasion de sensibiliser et de se former pour accélérer notre transition éthique. Et quoi de mieux pour se former que de faire intervenir des experts et experts passionnés par ces différents sujets.
Vous aussi, vous voulez rendre vos pratiques plus éthiques ? Alors plongez avec nous dans l’enquête.
On vous embarque dans nos rencontres et nos échanges à travers une série de podcasts qui vous accompagnent au cœur de nos enjeux éthiques. De quoi vous inspirer avec des solutions concrètes pour votre activité professionnelle.
Lili [00:00:51]
Ce trimestre, on plonge dans la dimension écoresponsable du numérique éthique.
Pollution numérique, web écoresponsable, sobriété numérique, écoconception. Bref, on mène l’enquête pendant trois mois pour creuser et approfondir les différents enjeux sur le sujet.
Quels sont les impacts du numérique sur l’environnement ?
Où en est le cadre légal et quels sont les enjeux politiques ?
Comment pouvez-vous agir à un niveau personnel et professionnel ?
Vous allez découvrir tout ça dans cette série de quatre épisodes. On espère qu’elle vous sera utile pour rendre vos pratiques professionnelles et personnelles plus responsables.
Avant de nous lancer dans le vif du sujet, on tient à clarifier un point. La différence entre responsable et écoresponsable. La responsabilité, dans ce contexte, englobe non seulement l’aspect environnemental, mais aussi les aspects sociétaux et économiques. Alors que l’écoresponsabilité est exclusivement focalisée sur l’environnement. Dans cette série, on se concentre donc uniquement sur l’impact environnemental du numérique.
L’idée étant de traiter une dimension par série pour dresser un portrait du numérique responsable au fil de nos enquêtes.
Lili [00:02:00]
Après avoir abordé de grands concepts comme la sobriété numérique et passé en revue le cadre légal autour du numérique écoresponsable, dans cet épisode, place à l’action.
On passe à encore plus de concret : les actions que l’on peut mettre en place à notre échelle en tant qu’utilisateurs et utilisatrices de services numériques.
Et ce, dès à présent. Parce qu’on ne peut plus attendre et c’est maintenant qu’il faut agir !
Selon le sixième rapport du GIEC, paru cette année 2022, il nous reste trois ans pour diminuer drastiquement notre empreinte carbone. Cela veut dire revoir nos comportements et effectuer des changements de fond. Vu l’impact du numérique sur notre empreinte environnementale, autant se pencher de près sur le sujet.
Nous allons donc faire le point sur toutes les bonnes pratiques que vous pouvez adopter dans votre usage du numérique. Et surtout, on va examiner le cas des terminaux.
Si vous suivez la série depuis le début, vous savez que c’est ce qui pollue le plus au niveau du secteur du numérique.
Lili [00:02:57]
Pour cet épisode, nous sommes accompagnés de :
- Tristan Nitot, animateur du podcast l’Octet Vert et entrepreneur,
- Christophe Clouzeau, Expert green UX et éco-conception numérique chez Temesis,
- Margo Chaillou, co-fondatrice et CEO de Improved Impact,
- Ferréole Lespinasse, conseillère en sobriété éditoriale, refonte de site internet, rédaction et production de contenus,
- Agnès Crepet, head of software longevity et IT pour Fairphone,
- Anne Rabot, experte Green IT, directrice RSE et relation client de Resilio,
C’est parti pour un épisode rempli de bonnes pratiques. Vous allez le voir, il y a de quoi faire.
Les actions pour un numérique éco-responsable
Lili [00:04:07]
Pour bien commencer, dites-vous que toutes vos actions ont un impact. Comme nous le rappelle Margo.
Margo [00:04:10]
Chaque utilisateur [et utilisatrice] peut avoir un impact.
Moi j’ai une question pour vous : Est-ce que vous connaissez le point commun entre le streaming et l’Espagne ?
Je vous donne tout de suite la réponse. Ils produisent autant de CO2. Donc toutes les vidéos en streaming qu’on va regarder produisent autant de CO2 que l’Espagne.
Lili [00:04:30]
On a donc demandé à nos intervenants et intervenantes des conseils pour vous aider à passer à l’action, des pratiques concrètes pour adapter vos comportements à l’urgence climatique et pour faire la différence en tant qu’individus.
Christophe nous a dressé une liste non exhaustive.
Il nous a aussi bien fait comprendre que prendre soin de ses appareils est la meilleure marche à suivre.
Christophe [00:04:52]
Si j’en avais une à donner, c’est clairement chouchouter vos appareils.
Vous les mettez dans du coton, dans du velours. Je ne sais pas, vous les mettez sous verre, vous leur faites des bisous, vous les caressez…
Vous faites ce que vous voulez, mais il faut chouchouter vos appareils. Puisque comme l’impact [sur l’environnement] est du côté de la fabrication, à partir du moment où l’appareil, vous l’avez en mains, 80 % de l’impact a été fait.
Donc plus on prolonge sa vie, plus on prolonge la durée de vie de l’appareil, plus on atténuera cet impact.
S’il y en a un vraiment à retenir, c’est ça.
Après, sur les usages, il y a plein de choses à dire. C’est réduire le temps passé. C’est envoyer des mails par exemple aux bonnes personnes, plutôt que de mettre à chaque fois toute sa hiérarchie en copie, parce que ça fait autant de destinataires. C’est peut-être arrêter d’écouter de la musique en vidéo.
Beaucoup de gens écoutent de la vidéo. Alors je n’empêche pas d’écouter de la vidéo. Ça m’arrive aussi d’aller sur YouTube pour retrouver un clip et de l’écouter alors que je fais autre chose.
Mais il y a peut-être moyen de l’écouter aussi en bas débit. Par exemple, vous n’aurez aucune différence de qualité sonore à écouter de la vidéo à 160P plutôt que 1080. Vous ne verrez aucune différence.
C’est réfléchir, surtout avant d’acheter. Puisqu’on parle d’impact sur la fabrication.
Avant d’acheter du matériel neuf ou un appareil qui vous fait croire qu’il y a [un meilleur] appareil photo et qu’il est meilleur la nuit, comparé à votre édition qui a un an, juste réfléchir un peu plus responsable avant d’acheter tous ces appareils-là.
Et puis pensez seconde vie sur les équipements pour pouvoir les transmettre. Voire acheter de seconde main.
C’est tout à fait possible.
Moi, je sais que j’ai un équipement aujourd’hui qui date de 2012. C’est un MacBook Pro de 2012. J’ai changé les disques durs, j’ai changé la RAM, j’ai changé parfois des nappes à l’intérieur, et il est toujours là.
Donc pour le coup, c’est tout à fait possible d’avoir un matériel « un peu vieillissant » mais toujours à l’ordre du jour.
Et puis, il y a quand même une réflexion à mener. Ça, c’est un petit peu plus délicat. Mais tout ce qui est lié à l’utilisation du cloud.
On sait que quand on met quelque chose sur le cloud, c’est très pratique. On peut le retrouver n’importe où, sur toute la planète etc. Mais les services de cloud, ce n’est pas magique en fait. Ce sont des disques durs mis à votre disposition et c’est mirroré.
C’est dupliqué ; on estime entre trois et dix fois selon les services.
Donc l’idée n’est pas d’interdire l’utilisation du cloud.
Typiquement chez Temesis, on est en télétravail. On utilise le cloud tout le temps. Et à titre personnel, je sauvegarde aussi mes données type photos en ligne. Mais ne pas le faire partout, mais plutôt de manière raisonnée, modérée et de manière maîtrisée.
Voilà, c’est tout ça. C’est vraiment lié à l’utilisation globale du numérique.
Lili [00:07:31]
Ferréole nous partage les usages qu’elle met en place. Et elle n’y va pas par quatre chemins.
Ferréole [00:07:37]
Déjà j’ai supprimé les réseaux sociaux de mon téléphone, ainsi que mon adresse mail pro.
Déjà ça permet d’avoir un usage moindre du téléphone.
Ensuite, effectivement, je pense avoir aussi toute une réflexion effectivement sur « qu’est-ce que j’utilise comme logiciel » ? Est-ce que je vais sur Google ou pas ? Ou j’y vais vraiment en dernier recours quand je n’ai pas le choix.
Moi c’est vraiment quelque chose que je mets en place, avec toute la problématique que ça peut entraîner.
Arrêter d’utiliser les produits Google par exemple, pour l’agenda ou pour les contacts, du coup, on est dans quelque chose de beaucoup moins aisé à utiliser. Par contre, au moins, je suis sûre que mes contacts ne sont pas récupérés et ça, je trouve ça très chouette.
Je pense qu’il faut donc être convaincu [ou convaincue] pour adopter de telles pratiques.
Et je peux donner aussi un exemple plus professionnel. Je dirais, c’est aussi réfléchir avant d’envoyer des contenus sur les réseaux sociaux, complètement débiles, type vidéo de chat.
En fait, ça participe à la charge mentale et au brouillage de l’esprit.
Je pense qu’il faut sortir de cette civilisation du jeu tout le temps, partout. Je rigole et j’envoie des conneries à tout le monde. Je ne suis pas sûre que ça fasse avancer les choses pour tout le monde et qu’il y ait vraiment une gratification qui soit telle que ça mérite de brouiller les esprits et de polluer les réseaux.
Lili [00:08:56]
Pour ce qui est de votre usage même du numérique, Margo vous explique comment optimiser au maximum vos pratiques pour réduire votre pollution numérique.
Margo [00:09:04]
Du coup, quelles sont nos actions à nous citoyens [et citoyennes] ?
Ça va être de regarder nos séries en streaming au lieu de les télécharger en ultra haute qualité. Peut-être réduire la qualité de téléchargement qui permet vraiment de réduire l’impact. Et très sincèrement à l’œil, on ne voit pas forcément la différence sur nos écrans.
Quand on est sur nos smartphones, pour tout ce qui va être visio et communication, ou même regarder une vidéo, il vaut mieux le faire en Wi-Fi qu’en 4G. C’est un réseau qui consomme moins.
Sur toute la partie boîte mail : les mails sont stockés, sur le serveur qui l’a envoyé, sur le serveur qui le reçoit. Donc c’est des mails qui sont stockées plusieurs fois. Et quand on envoie des mails avec des pièces jointes très lourdes et qu’on envoie à 20 personnes, il faut savoir que du coup, ce message-là va être stocké à 20 endroits différents.
Donc pensez à supprimer. Faire un peu de ménage de temps en temps dans ses boîtes mail.
Supprimer les pièces jointes si on n’en a plus l’utilité, ne pas renvoyer des mails à la terre entière quand on veut s’adresser à une seule personne. Peut-être aussi mettre des liens de téléchargement de fichiers, que la personne aille chercher uniquement si elle en a besoin.
Puis se désinscrire des newsletters qu’on ne lit plus et qui après arrivent dans nos spams. Parce que même si elles arrivent dans le spam, ça consomme quand même beaucoup. On peut en deux clics se désinscrire et ça permet effectivement de gagner en stockage de données.
Et donc en empreinte environnementale du numérique.
Lili [00:10:41]
Pour Tristan, il s’agit d’aller au-delà de son confort personnel et penser à la planète.
Tristan [00:10:47]
En tant qu’individu, et je ne dis pas que c’est facile, ça, c’est le geek que je suis depuis une éternité qui vous parle, en fait, le plus important, c’est d’arrêter d’acheter du matériel pour se faire plaisir.
Et ce n’est pas évident, parce qu’évidemment, les fabricants redoublent d’efforts pour nous faire baver sur telle ou telle fonctionnalité qui prétendument va nous changer la vie, va nous rendre super cool.
Moi je n’ai pas de télé 4K. Ma télé doit avoir pas loin de quinze ans.
Mon smartphone, je l’ai acheté d’occasion et ensuite je l’ai donné à mon fils. Et puis j’en ai racheté un neuf, mais j’en prends grand soin. Il a une coque.
J’espère le garder au moins six ans et changer sa batterie quand c’est nécessaire. Et vraiment essayer de pas changer de matos, pour que le matos précédent, qui fonctionne encore, finisse dans un tiroir. Parce que les émissions de gaz à effet de serre de ce matériel, elles ont été émises lors de la fabrication et assez peu lors de l’utilisation.
Donc il faut faire durer ce matériel le plus longtemps possible. On peut aussi acheter en reconditionné, c’est important.
Je pense aussi à des petites astuces.
Par exemple, je sais que c’est le cas sur l’iPhone, une batterie, quand c’est chargée à fond, ça fatigue. Et donc ce que fait l’iPhone, et une astuce qui est assez intéressante, c’est que quand vous le mettez à recharger la nuit, il se charge jusqu’à 80 %. Et donc là, ça va, c’est pas toxique pour lui. Et il repère quand vous le débranchez le matin, à quelle heure vous avez l’habitude de le débrancher pour partir bosser. Juste avant ce moment-là, il se charge à 100 %. Donc il va rester chargé à 100 % le moins longtemps possible.
Alors que les anciens smartphones, ils avaient tendance à, dès que vous les branchiez le soir vers 23 h, et bien ils se chargeaient à fond. Et à 1 h du matin, ils étaient chargés à bloc et ils passaient toute la nuit chargés à bloc, jusqu’au départ de chez vous vers 8 h.
Donc prendre l’habitude de charger son smartphone à la même heure. Comme ça, le système apprend et il respecte sa batterie, il ménage sa batterie.
Lili [00:12:58]
Finalement, tout cela revient à se poser les bonnes questions. De quoi avons-nous réellement besoin ? C’est la question qu’Anne se pose pour prendre ses décisions d’achat.
Anne [00:13:07]
C’est d’économiser le plus possible les ressources, donc les matériaux, les minéraux et métaux extraits. Donc il faut moins fabriquer.
Et donc, à titre individuel, qu’est-ce qu’on peut faire ?
C’est faire durer son smartphone, faire durer son ordinateur plus longtemps.
Se demander si le dernier objet connecté à la mode est vraiment nécessaire.
Est-ce qu’on a besoin d’avoir des volets connectés, une caméra connectée, une alarme connectée, etc., chez soi.
Un assistant personnel, pour demander la météo ? Donc il y a tous ces usages à arbitrer à titre individuel et puis faire attention à son matériel.
Lili [00:14:06]
Il y a de quoi faire. Évidemment, il s’agit d’une liste non exhaustive. Il existe en effet des tonnes de bonnes pratiques à mettre en place.
On vous en partage d’autres dans l’article qui accompagne cet épisode. Et puis vous en retrouverez encore plus en suivant nos intervenants et intervenantes sur leurs sites et réseaux sociaux.
Les terminaux
On se rend compte que tout le monde s’entend sur l’ampleur de l’impact des terminaux sur l’empreinte carbone numérique. On en parle depuis le premier épisode de cette série.
C’est de loin ce qui pollue le plus dans le secteur numérique.
S’il y a bien un comportement que vous pouvez changer pour avoir un maximum d’impact, c’est par rapport au choix et au renouvellement de vos terminaux. Pour comprendre plus en profondeur l’impact catastrophique des terminaux sur le monde, on a laissé la parole à Tristan.
Tristan [00:14:56]
Il y a une étude très intéressante qui a été publiée par GreenIT.fr en février 2021. Cette étude s’appelle INUM 2020.
Elle étudie les impacts du numérique en France en 2020.
Pourquoi j’insiste sur la notion du fait que c’est en France ? C’est que la France a ceci de particulier que son électricité est très largement décarbonée.
C’est-à-dire que produire de l’électricité en France, via le nucléaire essentiellement, mais aussi avec de l’hydraulique, les barrages, ce qu’on appelle l’hydro électricité, eh bien c’est très peu carboné. En fait, ça émet très peu de dioxyde de carbone, donc très peu de gaz à effet de serre.
Et donc, ça contribue très peu à la problématique du changement climatique.
Mais la France est une exception en fait de ce point de vue-là.
En Pologne, par exemple, en Allemagne, on le voit [aussi] en Belgique, les gens qui ont décidé de réduire l’électricité d’origine nucléaire, ou qui n’en ont tout simplement pas eu. Eh bien, à ce moment-là, pour produire de l’électricité, ils vont brûler des hydrocarbures. Alors ils n’ont pas de problème de déchets nucléaires, ou ils en ont moins que nous. Mais derrière, ils ont des gros problèmes d’émission de gaz à effet de serre.
Donc le cas de la France est vraiment spécifique de ce point de vue-là. C’est important de resituer ça dans ce contexte.
Cette étude INUM 2020 de GreenIT.fr, elle étudie d’où viennent les différents impacts. Pour cela, ils ont utilisé quatre façons de le calculer.
Ils ont calculé les dépenses en énergie. Ils ont calculé les émissions de gaz à effet de serre. Ils ont calculé les utilisations d’eau et l’utilisation de ressources abiotiques. C’est-à-dire des minerais, de la terre qu’il faut retourner. Et ils ont fait ce qu’on appelle une analyse du cycle de vie.
C’est-à-dire qu’ils ne regardent pas simplement ce qui est consommé quand l’utilisateur [ou l’utilisatrice] utilise les systèmes, mais aussi d’où viennent par exemple les émissions de gaz à effet de serre au moment de la fabrication.
Parce qu’en fait, un produit a un cycle de vie.
Au début, on le fabrique, ensuite on l’utilise et ensuite, idéalement, on le répare pour le faire fonctionner le plus longtemps possible. Et enfin on le recycle. Ils ont étudié les deux phases les plus importantes qui sont la fabrication et ensuite l’utilisation.
Et puis ils se sont focalisés sur trois niveaux différents du numérique.
Le premier niveau, c’est celui qu’on voit, qu’on connaît parce qu’on l’a dans la main, ou sous les doigts. C’est le terminal.
Qu’est-ce que c’est un terminal ? C’est ce qui vous permet de vous connecter à Internet et d’utiliser un service numérique. Donc ça va être par exemple un smartphone ou bien une télévision connectée. Elles sont presque toutes connectées aujourd’hui. Ou bien un PC portable, ou bien une console de jeu, ou bien un PC de bureau. Et évidemment, tous les écrans qui vont avec.
Ça, c’est le premier niveau.
Le deuxième niveau, c’est le réseau qui nous permet de nous connecter au troisième niveau, qui est le data center.
C’est là où sont stockés les serveurs qui contiennent nos données et qui font des calculs pour nous. Et dans quasiment tous les usages numériques qu’on a, on utilise ces trois niveaux, ces trois tiers.
On utilise un terminal. Ce terminal se connecte au réseau. Ce réseau, à un data center. Ensuite, à nouveau vers le réseau et vers un autre terminal.
Donc rien que le fait d’envoyer un email ou de chatter avec un copain ou une copine sur une messagerie instantanée, j’utilise à chaque fois ces trois tiers, éventuellement plusieurs fois.
Et en fait, j’arrive au fait ! Cette étude en 2020, elle démontre qu’au niveau des émissions de gaz à effet de serre, si l’ordinateur ou le terminal est utilisé en France, c’est la fabrication du terminal qui est plus importante. Mais de très, très loin.
Puisque la fabrication du terminal émet 76 % des gaz à effet de serre.
Et derrière, on entend parfois dire que le réseau c’est dramatique, ça consomme trop, etc. Que les datacenters c’est monstrueux, ça pollue etc.
Et en fait, en émissions de gaz à effet de serre, le réseau il est de l’ordre de 10 % en tout, et 6 % pour les datacenters. Donc c’est très peu.
Donc le vrai problème, le gros levier, celui qu’on a [et] sur lequel on peut agir avec un maximum d’impact, c’est d’éviter la fabrication des terminaux. Si la fabrication des terminaux, c’est 76% des émissions de gaz à effet de serre.
Eh bien, ça implique un certain nombre de choses. Et en particulier, qu’il faut les faire durer le plus possible.
Il faut donc amortir les émissions de gaz à effet de serre de la fabrication le plus longtemps possible pour éviter de refabriquer trop tôt des terminaux, et ainsi réémettre trop tôt des gaz à effet de serre.
C’est là le plus gros levier qu’on a. C’est éviter la fabrication des terminaux.
Lili [00:20:05]
Mais alors, comment concrètement est-ce qu’on peut chouchouter nos terminaux, comme dirait Christophe ? Tristan nous a donné ses astuces pour y parvenir.
Tristan [00:20:13]
En tant que consommateur, il y a plusieurs choses.
Premièrement, je vais donc garder mon terminal le plus longtemps possible.
Si mon terminal, c’est un smartphone, je lui met une coque.
Si c’est une télé, j’évite de la changer à chaque Coupe du monde, en me disant que les images seront encore meilleures. Franchement, je vous encourage à éviter de passer à la 4K. Parce qu’en fait vous allez voir, c’est expliqué dans l’étude, la télévision c’est hyper consommateur de ressources et émetteur de gaz à effet de serre quand on la fabrique.
Donc en fait, parmi les terminaux, ce qui pose le plus de problème, c’est la télévision, ou les écrans en général.
On peut moderniser et réparer son terminal. Changer la batterie, remplacer son disque dur par un SSD qui donne un coup de boost énorme à la rapidité de l’ordinateur. Lui rajouter des barrettes de mémoire si c’est nécessaire.
Et évidemment, on peut faire le ménage sur son disque dur. Supprimer toutes les vidéos débiles qui ne servent à rien et les emails avec des grosses pièces-jointes.
Ça déjà, ça peut aider à faire durer son matériel plus longtemps.
En tant que professionnel du numérique, les leviers sont très différents. Mais on a toujours autant intérêt à faire durer le terminal. Pour ça en fait, c’est tout simple. Les terminaux, ils vivent très longtemps. Et souvent, les gens les changent parce que les terminaux ne fonctionnent plus assez vite.
Et ça, c’est un peu de notre faute, professionnelles [et professionnels] du numérique. On a tendance à vouloir en faire toujours plus.
L’exemple qui me hérisse le poil, c’est quand on met des vidéos en fonds d’écran. Les vieux terminaux, ils ont du mal à fonctionner avec ce genre de choses. Des pages web avec des vidéos en arrière-plan. C’est vrai que ça donne un côté dynamique, mais franchement, ça consomme énormément de ressources.
Ça fait ramer les vieux terminaux, ça pousse les gens à les changer en se disant : « oui, il marche encore, mais il est trop lent maintenant ». Et ça, ce n’est pas une approche qui est responsable.
Et puis aussi, quand on fait des applis, et en particulier les applis mobiles, il ne faut pas exiger de l’utilisateur [ou l’utilisatrice], qu’il utilise un système d’exploitation moderne avec les nouvelles API. Il faut être compatible avec les vieux terminaux, parce que sinon, on les pousse à l’obsolescence alors qu’ils fonctionnent encore.
Et donc on fait partie du problème plutôt que de faire partie de la solution.
Lili [00:22:34]
Avec toutes ces astuces, on vous lance un défi : garder votre téléphone plus de cinq ans.
D’ailleurs, qui de mieux placée pour parler de la longévité de nos terminaux qu’une spécialiste engagée luttant contre l’obsolescence programmée ?
On a posé toutes nos questions à Agnès de Fairphone, qui nous expose les démarches de son entreprise.
Agnès [00:22:54]
Il y a un rapport de l’ARCEP qui était sorti fin 2020, qui dit qu’en gros, l’empreinte environnementale du numérique, elle est en principalement sur les terminaux, à 80 %.
80 % sur la production des terminaux. Elle est aussi sur les réseaux et sur les data centers.
Et c’est aussi pour ça que chez Fairphone, on avait envie de faire un téléphone. Parce que le but de Fairphone, ce n’est pas de faire un téléphone mieux que les autres, c’est de faire un téléphone pour prouver que c’est possible de faire un téléphone responsable. Et pour pousser les autres acteurs industriels à faire la même chose.
Et vu justement la prédominance des terminaux dans l’empreinte environnementale globale du numérique, c’est un très bon use case. C’est un très bon terrain d’application, où on peut montrer qu’on peut faire les choses différemment.
Je rajouterais peut-être juste une chose sur la mesure de cette empreinte environnementale.
Ce que je veux juste souligner, c’est qu’aujourd’hui, on s’intéresse beaucoup à ce qui sort du téléphone, aux émissions de gaz à effet de serre qui sont émises lors de la production du téléphone etc.
Très bien, c’est un bon moyen de mesure, pas de souci.
Mais il y a quand même un institut germanique allemand, qui s’appelle l’Institut Reportal, qui propose une autre mesure que je trouve vachement intéressante. C’est la mesure du MIPS. Et cette mesure-là, elle se propose de s’intéresser à toutes les ressources abiotiques, de type minéral, etc., qui sont nécessaires à la production de ce téléphone.
Donc on parle souvent de sac à dos écologique sur la mesure du MIPS. D
onc elle est beaucoup plus globale que la simple mesure des émissions de gaz à effet de serre. Et dans ce rapport de l’ARCEP, c’est peut-être aussi un chiffre qui a été propulsé par l’ADEME en 2022, on est à peu près à 62 millions de tonnes de ressources, quelle que soit la ressource : abiotique, eau, métaux, etc., qui sont utilisées par an pour produire et utiliser tous les équipements numériques.
Lili [00:24:56]
C’est juste énorme. Et pourtant nous sommes nombreux et nombreuses à continuer de changer de téléphone tous les ans ou tous les deux ans.
Pourquoi ? Qu’est-ce qui nous pousse à ce renouvellement permanent ?
Agnès nous parle de l’obsolescence programmée qui se cache derrière nos terminaux.
Agnès [00:25:12]
En gros, l’obsolescence programmée se matérialise par différentes formes d’obsolescence, on va dire.
Ce n’est pas ma définition à moi, c’est la définition sur laquelle on s’accorde. Vous pouvez retrouver ça aussi sur le site HOP, Halte à l’obsolescence programmée ! Donc c’est pas moi qui le dis. Il y a tout un tas d’experts [et d’expertes] qui s’accordent à dire la même chose.
Donc l’obsolescence programmée, elle peut être tout d’abord fonctionnelle, structurelle.
Liée à l’appareil sur lequel on s’intéresse ; est-ce que c’est une télé, un smartphone etc. En gros ça va toucher le cas d’utilisation où cet appareil ne va plus fonctionner, parce que sa durée de vie s’est arrêtée à cause d’un composant qui ne fonctionne plus par exemple.
Typiquement un composant qu’on va pouvoir enlever ou pas enlever.
On parle d’obsolescence directe ou indirecte sur cette obsolescence fonctionnelle. En gros, vous avez le processeur de votre ordinateur qui ne marche plus, qui n’est pas réparable, : on parle d’obsolescence fonctionnelle/structurelle.
Ensuite, vous avez l’obsolescence logicielle.
Alors les gens font souvent la distinction, mais parfois j’aurais tendance à dire que c’est peut-être plus simple de regrouper l’obsolescence fonctionnelle et l’obsolescence logicielle. Mais peu importe.
Officiellement, on s’intéresse aussi à un deuxième type d’obsolescence, qui s’appelle l’obsolescence logicielle.
Et qui concerne principalement les devices électroniques, comme les téléphones portables, les ordinateurs, les tablettes. Et qui va devenir encore plus importante avec l’internet connecté, l’internet des objets.
Et donc, en gros, ça va toucher à vraiment mon job chez Fairphone.
Le fait que, comme je disais tout à l’heure en introduction, que mon boulot, c’est de faire en sorte d’allonger la durée de vie du support logiciel des téléphones, eh bien typiquement, l’obsolescence logicielle, quand un appareil est dit obsolète d’un point de vue logiciel, ça suppose qu’il y a plus de support logiciel de cet appareil au bout de x années. Par exemple deux ou trois ans. Ce qui est à peu près la durée de vie du support logiciel des smartphones.
Aujourd’hui, vous achetez un téléphone Android d’une marque connue. Votre téléphone est parfaitement fonctionnel du point de vue matériel : le haut-parleur marche, l’écran n’est pas cassé, etc. Tout va bien.
Mais du point de vue logiciel, ça ne marche plus.
Vous ne pouvez plus installer votre application préférée parce que vous avez une vieille version d’Android et qu’il n’est pas possible d’installer une nouvelle version d’Android. Ça, on parle d’obsolescence logicielle.
Donc ça touche au support logiciel qui s’arrête. Ça touche à des incompatibilités de versions. Donc ça, c’est ce que j’ai expliqué avec l’application.
Vous avez votre application préférée qui ne tourne plus sur la version d’Android qui est installée sur votre téléphone. Ou encore un exemple plus classique : vous avez une application bancaire qui requiert un niveau de sécurité adéquat pour sécuriser une transaction bancaire sur votre site bancaire. Eh bien, cette application bancaire ne va évidemment plus marcher sur une version d’Android qui n’est plus maintenue par Google. La version 8 par exemple.
Donc si votre téléphone, il est bloqué sur une version 8, parce que justement, votre fabriquant de téléphone n’a pas fait d’efforts de mettre à jour une nouvelle version d’Android sur ce téléphone-là, eh bien, vous ne pouvez plus utiliser votre application bancaire et ça va bien vous embêter. Parce que si vous ne pouvez plus sécuriser vos transactions bancaires avec votre téléphone, vous allez appeler votre banque qui va vous trouver un moyen alternatif. Mais ça va être compliqué.
Aujourd’hui, le numérique, je ne rentre pas dans le débat de savoir si c’est bien ou pas.
Mais le numérique s’appuie de plus en plus sur des apps. Et ses apps parfois, elles sont incompatibles avec la version de l’OS, la version du système d’exploitation Android, par exemple, qui est installée sur les téléphones. Donc là, on parle d’incompatibilité. Et l’incompatibilité fait partie de l’obsolescence logicielle.
Et enfin, on a un dernier type d’obsolescence, dite psychologique, culturelle ou plutôt esthétique.
Et en gros, ça consiste à dire que votre téléphone, ou votre ordinateur, vous le trouvez un peu démodé. Je cite souvent l’exemple du téléphone qui se plie, le foldable smartphone, qui je trouve être une fonctionnalité complètement inutile.
Ça, c’est mon point de vue.
Mais peut-être que mon voisin qui est à côté de moi dans mon bureau va trouver que c’est génial d’avoir un téléphone qui puisse se plier. Et que son téléphone, qui a simplement deux ans, vu qu’il ne se plie pas, eh bien il est un peu démodé. Donc il va vouloir le changer son téléphone, alors que tout fonctionne. Du point de vue logiciel, ça peut fonctionner.
D’un point de vue matériel, ça peut fonctionner. Mais on va avoir ce comportement de consommation qui va juger qu’un téléphone un peu trop vieux est démodé.
Et aussi, j’aimerais bien toucher un point de vue qui m’intéresse, ce n’est pas que le consommateur [ou la consommatrice] qui est bête et méchant et qui veut tout de suite avoir des nouvelles features qui servent à rien. Il y a aussi l’approche systémique qui est à mon avis importante à souligner.
Ce n’est pas que la faute de l’utilisateur, ou de l’utilisatrice. Il et elle sont poussés à avoir ces comportements-là. Les campagnes promotionnelles, les opérateurs qui vous poussent à changer votre téléphone au bout de x mois pour avoir quelque chose de nouveau, etc.
Tout le marketing, toute la publicité qui est faite autour du fait que ce serait trop bien, trop classe d’avoir ce téléphone pliable, va pousser l’utilisatrice ou l’utilisateur à avoir ce comportement de consommation extrême.
Donc voilà. Obsolescence fonctionnelle, obsolescence logicielle, obsolescence esthétique ou psychologique, ce sont les grandes catégories d’obsolescence.
Lili [00:30:20]
En tant qu’utilisatrices d’appareils numériques, on se sent plus que concernées. On a voulu savoir comment on pouvait limiter notre consommation numérique. Agnès nous éclaire sur le choix de nos terminaux.
Agnès [00:30:33]
La première étape, déjà, même si ça vaut ce que ça vaut, ça peut être d’essayer de regarder quand même ce qui est à disposition dans votre magasin.
Regardez l’indice de réparabilité.
C’est pas grand-chose, mais c’est déjà un truc de s’intéresser à ça. Parce que ça veut dire qu’on s’intéresse à la durabilité de l’appareil. On va s’intéresser non pas à la nouvelle feature, du fait qu’il se plie, mais on va aller plus loin et on va vouloir avoir un appareil qui dure.
Donc essayer de se limiter, de [combattre] notre goût pour l’obsolescence esthétique et culturelle.
Et après ?
Au-delà des indices et de la note qu’on voit à la Fnac ou chez Darty, l’idée, ce serait évidemment d’aller un peu plus loin sur ce qui est à notre disposition en tant que consommateur [ou consommatrice] pour faire un choix de marque.
Donc Fairphone, on fait beaucoup d’open publications.
On publie des blogs. On publie des Impact Report. On vous explique ce qu’on fait. Justement, ces fameux programmes. On explique pourquoi c’est important de bosser avec les mineurs artisanaux.
Donc évidemment que ça, c’est le choix ultime. C’est-à-dire que ce que je peux faire, c’est aller intéresser les consommateurs, pousser les consommateurs [et consommatrices] à aller s’intéresser à la marque qui est derrière le téléphone [qu’ils et elles veulent] acheter.
Si jamais vous ne trouvez aucune information sur ce qui se passe derrière la supply chaine, c’est déjà un signe qu’il ne doit pas se passer des choses chouette ! Grosso modo.
Donc ça, c’est la première chose.
Mais tout le monde n’est pas prêt à le faire. En tout cas, au moins de vérifier si des choses sont publiées ou pas. Et après, ça peut être aussi de changer de mode de consommation.
Je parlais de Commown tout à l’heure, donc la coopérative qui soutient le fait de faire par exemple de la location d’appareils électroniques.
Donc plutôt que d’acheter un appareil, pourquoi on passerait pas par des coopératives, où je ne suis pas obligée d’acheter un téléphone, je vais le louer à travers leurs services. Donc j’arrête de me mettre dans ce délire ultra consumériste d’acheter les téléphones tous les ans, tous les deux ans. Je vais demander à Commown de me choisir [un modèle].
Ils n’ont pas 36 modèles, ils en ont un ou deux. Ils ont des Crosscall, des Fairphone. Sur les laptop, ils en ont aussi quelques-uns.
Et donc je vais passer par eux, je leur fais confiance et je vais louer un appareil à travers leur service et c’est eux qui vont prendre en charge la réparabilité.
C’est eux qui vont me guider aussi sur mon utilisation responsable. C’est des gens qui poussent aussi la sensibilisation à nos datas : est-ce que mes datas sont bien protégées? Etc. Donc là, on est plutôt dans une démarche un peu plus poussée de « je change mon habitude de consommation ».
Non seulement je vais faire attention à ce que j’achète, mais en plus je ne vais plus acheter pareil.
Et potentiellement « plus acheter pareil », ça peut être plus acheter. Ça peut être juste louer quoi.
Lili [00:33:05]
Avant de choisir un nouveau téléphone, on peut se demander si c’est vraiment nécessaire.
Agnès nous a expliqué la marche à suivre quand on se retrouve confronté [ou confrontée] aux potentiels renouvellements de nos terminaux.
Elle nous donne quelques critères pour évaluer si on a vraiment besoin d’un nouveau portable et ce que l’on peut faire dans le cas contraire.
Agnès [00:33:24]
Essayer de se démarquer un peu de l’obsolescence esthétique.
Donc même si votre téléphone il est un peu abîmé. Voilà, un petit coin qui est un peu corné, eh bien ce n’est pas très grave. Au pire, on passe dessus, c’est pas ça qui est essentiel.
Si votre téléphone, il est fonctionnel, il est toujours à jour du point de vue sécurité…
Ça j’insiste beaucoup sur la partie logicielle. Un téléphone qui n’a pas de mise à jour logicielle, c’est très dangereux parce que ça veut dire que vos data personnelles sont mises à mal. Vous pouvez être attaqué, vous pouvez avoir des virus. Vous pouvez avoir une personne malveillante qui va traquer vos datas.
Donc voilà, il y a quand même des choses à vérifier sur l’état de votre appareil.
Mais s’il est encore fonctionnel, s’il a des mises à jour de sécurité, si du point de vue matériel il n’est pas complètement détérioré, il faut le garder.
Ça, c’est le premier acte responsable. Gardez vos appareils quand vous pouvez les garder.
Après, si vous tombez dans ces cas de figure-là : il y a un truc qui est cassé, le logiciel semble ne plus marcher. Essayez de le réparer ou de le faire réparer.
Premier démarche responsable ; vous allez essayer de le faire réparer. Moi je dis souvent que les repair shop, c’est très bien en fait. Moi j’ai rien contre. Si vous habitez dans une ville de taille correcte, vous en avez beaucoup des repair shop.
Mais vous avez aussi des services comme Commown, où vous n’avez même pas à vous préoccuper de la réparation dans un repair shop. C’est eux qui vous procurent ce service de réparabilité. Donc, si jamais vous avez la volonté de le changer, [intéressez-vous] à cette démarche-là.
C’est vachement important, comme je disais tout à l’heure.
Est-ce qu’il y a une durée seuil ?
Disons que ça serait super bien qu’on ne pense pas changer son appareil avant au moins cinq ans, mais idéalement dix. Si jamais votre appareil le permet. Si je parle des smartphones, par exemple.
En fait, nous, sur le Fairphone 2, la semaine dernière, on a sorti une mise à jour d’Android 10 sur le Fairphone 2. Ça va nous porter à sept ans le support de l’appareil.
Donc sept ans dans le monde Android, personne ne fait mieux.
Mais j’aimerais bien qu’à un moment donné, on arrive à ce monde-là, où par défaut, dans le monde Android tout le monde fasse du sept ans. Mais pourquoi pas plus quoi ? Pourquoi pas plus ?
On a signé une campagne récemment sur le droit à la réparation, etc., qui essaie de promulguer un droit à dix ans. Et sur les ordinateurs, évidemment qu’on est sur des durées plus grandes. Faire attention aux critères qui vont vous permettre de juger si votre appareil va durer longtemps ou pas. Donc ces indices-là, comme je l’ai dit tout à l’heure, sont très bien.
Les indices de réparabilité et durabilité, c’est mieux que rien, on va dire. Parce que ça vous permet de comprendre en un coup d’œil des choses compliquées.
La disponibilité des pièces détachées, c’est pas facile d’avoir ce genre d’informations facilement.
Donc c’est pour ça que c’est bien d’utiliser ces indices-là. Donc les questions qu’il faut se poser avant de changer, si vraiment je veux changer…
Voilà les critères qu’il va falloir que je regarde.
Est-ce que je vais pouvoir allonger la durée de vie de mon téléphone ? Et si c’est trop compliqué pour vous, si c’est trop galère de choisir un truc où vous ne comprenez rien, eh bien, des changements de comportement de consommation, comme de passer par des coopératives de location, c’est aussi très bien.
Lili [00:36:16]
Comme quoi on n’a pas toujours besoin d’acheter un nouveau téléphone.
Mais dans le cas où ça arrive, que fait-on de l’ancien ?
Agnès nous a éclairées sur quelques pistes pour donner une seconde vie à nos vieux appareils numériques.
Agnès [00:36:28]
Qu’est-ce qu’il faut faire d’un téléphone usagé ? Il y a les points de collecte, il y a le reconditionnement.
Donc vous pouvez essayer de revendre votre téléphone à travers des solutions existantes, des plateformes existantes. Si vous allez sur Back Market, vous allez avoir des options possibles, mais vous pouvez aussi utiliser certaines solutions plus associatives. Il y a des associations qui existent, locales, qui vous permettent de bénéficier d’un moyen très simple de donner votre téléphone pour qu’il soit proprement reconditionné.
Back Market, je ne dis pas que ce n’est pas déjà une bonne première approche, mais je veux dire… On peut la pousser cette approche.
Fairphone, on a aussi ce genre de truc. Vous pouvez, si jamais vous avez un vieux téléphone dans votre tiroir, vous pouvez nous les envoyer. On vous donne un petit discount, etc.
Donc Back Market, Fairphone, c’est bien d’utiliser ce genre de trucs, mais le local est bien aussi. C’est ça que je veux dire. Le local c’est bien, parce que parfois, ça évite des allers retours inutiles, de coûts de transport. Ce genre de choses quoi.
Et dans les villes, il y a quand même beaucoup de solutions qui peuvent marcher. Que ce soit à travers des associations, ou que ce soit à travers une déchetterie locale aussi. Il y a des déchetteries locales…
C’est vrai qu’il y a des enquêtes qui prouvent qu’elles ne font pas toutes le même boulot, mais sur le papier, c’est aussi satisfaisant.
Lili [00:37:46]
On doit vous avouer que, comme beaucoup d’entre vous, on mettait le reconditionné sur un piédestal. Sauf que cette solution a ses limites.
Agnès nous explique pourquoi.
Agnès [00:37:56]
Moi, je blâme pas Back Market en tant que tel, parce que c’est toujours bien d’avoir des solutions de téléphones reconditionnés, etc. Ça, c’est sûr.
Après, et c’est même les premiers à le dire, la problématique du reconditionné, à l’heure actuelle, ce n’est pas qu’en France, c’est un peu partout pareil, c’est la fameuse obsolescence logicielle.
Quand on va acheter un reconditionné, souvent, quand on fait l’achat de manière un peu rapide, ou qu’on est un peu novice en la matière, je ne blâme pas non plus les consommatrices et les consommateurs là-dessus, on va regarder de quand il date, s’il est pas trop vieux.
C’est déjà un bon critère.
On va regarder potentiellement la garantie qui est offerte avec. Le fait d’avoir ces nouvelles features, la qualité de l’appareil photo. Des choses très matérielles, des choses très liées à la partie matérielle du téléphone. La note de l’appareil photo, est-ce qu’il a un bon appareil photo, tout ça.
Pourquoi pas, c’est très bien ! Je suis pas contre ça.
Mais jamais personne, ou très rarement, va s’intéresser par défaut à la partie logicielle.
Est-ce que le téléphone que vous achetez reconditionné a une version d’Android récente ? Et encore plus important, est-ce que ce téléphone-là, que vous êtes sur le point d’acheter sur Back Market, c’est possible d’avoir une mise à jour Android plus récente ?
Déjà, l’information est compliquée à avoir.
Et en plus de ça, toute la logique de savoir ce pourquoi c’est important, elle est compliquée à comprendre aussi. Je citais tout à l’heure dans le podcast la problématique de « j’ai mon application bancaire. Tiens, elle ne va plus marcher sur la version Android 8 de mon téléphone. Parce qu’Android 8 n’est plus maintenu par Google. Bon, très bien ».
Et bien là, vous avez un cas d’obsolescence logicielle qui peut arriver.
On ne sera pas sur Android 8, on sera sur des versions d’Android plus récentes, mais qui peut arriver à votre téléphone, si vous l’achetez reconditionné. Parce que potentiellement, votre téléphone, vous allez le recevoir de Back Market. Il marche très bien d’un point de vue matériel.
Mais potentiellement, et ça vous le savez pas facilement, mais le constructeur qui est derrière ce téléphone-là, va arrêter le support logiciel dans six mois. Et donc ça vous le savez pas. Mais vous avez les boules, parce que six mois après, votre téléphone n’est plus complètement fonctionnel. Parce que cette application bancaire ne s’installe plus, parce qu’il n’y a plus de mises à jour de sécurité Android sur votre téléphone.
Et ça, c’est quelque chose de méconnu.
Et donc, de manière un peu caricaturale. Ne me prenez pas pour quelqu’un qui défend Apple, mais souvent, je dis pour éviter d’expliquer toute cette logique un peu compliquée, même si j’aime bien l’expliquer, je dis : « bah voilà, tu vas chez Back Market, c’est pas plus mal d’acheter un Apple ».
Parce qu’au moins, Apple fait un support logiciel très bien, très long. Apple vous avez un système IOS dont les mises à jour sont sur non pas deux ou trois ans mais plutôt cinq, six ans voire sept. Donc si vous voulez pas trop prendre de risques…
Encore une fois, ne pensez pas que je fais de la pub pour Apple, mais au moins c’est clair. Apple, c’est vérifiable, leur support logiciel est très bon et vous n’allez pas vous retrouver bloqué au bout de six mois, un an, à avoir ce problème de mise à jour de sécurité qui se fait plus quoi. Et sur le monde Android c’est vachement plus compliqué à savoir.
Les études sont peu nombreuses.
Les études on va dire impartiales qui peuvent vous expliquer si Samsung fait des mises à jour plus longues que Huawei etc. Mais bon, ça c’est plus compliqué à savoir. Et c’est pour ça que je dis tout le temps : « je suis pas contre le reconditionné, je dis juste que c’est une grosse problématique qui est vraiment méconnue et sur laquelle il faut être très vigilant ».
Donc typiquement, je reviens tout le temps à mon modèle de location via Commown. Au moins, ces gens-là, ils s’occupent de ça. Si vous n’y connaissez rien, si c’est trop compliqué, eh bien il y a des solutions comme ça qui sont clés en main.
C’est des experts, ils [connaissent] très bien les produits qui font des mises à jour long terme ou pas.
Ils ont des Fairphone, ils ont pas que des Crosscall. Ils ont aussi d’autres marques qui vous permettent de garantir que votre téléphone va durer, qu’il sera maintenu au niveau logiciel etc.
Je vous parie tout ce que vous voulez que vous êtes dans la rue et vous demandez à des gens : « c’est quoi un acte responsable en termes d’achat ? ».
Bah tout le monde va vous dire j’achète du reconditionné c’est cool. Personne va vous dire « bah tiens, je passe par une coopérative de location ». Alors que perso, je pense que la location est beaucoup plus responsable que d’acheter du reconditionné au final. Et je condamne pas Back Market.
Lili [00:42:17]
On espère vraiment voir les choses évoluer à ce niveau-là, car ça aura un impact décisif côté numérique. D’ici-là, on a demandé à Agnès vers quoi devrait tendre notre consommation numérique dans le meilleur des monde.
Agnès [00:42:31]
Tech won’t save us. La technologie ne nous sauvera jamais. Vraiment. Sincèrement.
Je pense qu’une technologie différente, une technologie plus responsable peut exister.
Ça, c’est cool, ça fait partie de mes rêves.
Mais concrètement, ce n’est pas que mes rêves, parce que je le fais au quotidien chez Fairphone. Donc heureusement, c’est plus mes rêves, c’est la réalité.
Mon rêve, ce serait qu’il y ait beaucoup moins de consommation numérique. Je veux dire, j’adore la science-fiction, mais en fait, j’en ai marre de tous ces bouquins de science-fiction, où on nous bombarde d’outils partout qui ne servent à rien, etc. J’ai pas envie forcément…
Moi, c’est pas mon trip la campagne. Je n’aime pas la campagne plus que ça, je n’ai pas envie d’un truc complètement sobre où je n’ai plus du tout accès à tout device et tout ça.
Mais mon rêve, ce serait une consommation vraiment beaucoup plus raisonnée. Qu’on soit beaucoup moins entourés d’appareils numériques et qu’on puisse avoir plus facilement des modes de sociabilisation, des modes de rencontre entre êtres humains qui passent par le numérique.
C’est ça mon rêve.
Conclusion
Lili [00:43:31]
Nous avons regroupé pas mal d’actions et de bonnes pratiques numériques dans cet épisode.
L’idée, c’est que vous choisissiez celles que vous pouvez et voulez mettre en place. On vous recommande de les prioriser par ordre d’importance et de faisabilité, de faire votre propre plan d’action avec des objectifs atteignables. C’est toujours plus motivant.
Commencez peut-être par le plus simple pour vous. Le plus important étant d’enclencher votre démarche numérique responsable.
Au fur et à mesure, vous pourrez incorporer la suite jusqu’à devenir un expert ou une experte du numérique responsable. On vous invite évidemment à vous questionner sur vos besoins dans toutes vos prochaines décisions de renouvellement de vos appareils numériques et électroniques. C’est vraiment ça la priorité.
Dans le prochain épisode, on se focalise sur les métiers du Web.
Vous travaillez dans le numérique ? Que ce soit dans la conception, le développement de sites Internet, la communication Web ou encore le marketing digital.
Vos actions ont encore plus d’impact, car vous êtes en charge de produire du contenu web et vous montrez l’exemple à votre clientèle. Donc restez connecté [ou connectée], cet épisode est fait pour vous.
Merci beaucoup !
Marine [00:44:43]
Cette série de podcasts fait partie du projet éthique de l’agence Hippocampe.
Notre mission : rendre le Web et l’entreprise plus éthique.
Nos trois objectifs : rendre nos pratiques encore plus humaines, renforcer notre sensibilité écologique et opter pour une gouvernance transparente. Chaque trimestre, on s’intéresse donc à un objectif et une initiative qu’on veut mettre en place pour y répondre.
Retrouvez toutes nos initiatives sur notre blog E-bullitions. Un outil pour la croissance numérique éthique des entreprises.
Hippo’dcast, un podcast qui vous plonge dans nos enquêtes sur l’éthique en entreprise et sur le web.
Réalisé avec bienveillance par Lili et Marine de l’agence web Hippocampe, une agence en pleine transition éthique.
Et la suite ?
Dans le prochain et dernier épisode, on fait le point sur les métiers du web.
Comment limiter notre impact environnemental en tant que professionnels et professionnelles du numérique ?
Pour suivre les conseils de nos experts et expertes, c’est par ici : écoconception et communication écoresponsable.